Pour une autre vision de la biodiversité
Les conséquences sociales et économiques de l’ignorance des coûts cachés associés à la destruction de la nature, de l’effondrement de la biodiversité et des dérèglements des processus biologiques étaient jusqu’à présent difficiles à imaginer, mais la crise sanitaire en cours donne un aperçu de l’absence de moyens évidents pour pouvoir les endiguer et les contrôler.
De plus en plus, on prend conscience que la technologie ne peut ni contrôler ni se substituer efficacement à de nombreux processus biologiques et écologiques, et que les infrastructures vertes sont plus résilientes que les infrastructures grises. Si on admet un peu de variation et d’incertitude propre au vivant, la biodiversité peut en revanche nous rendre beaucoup de services, de manière d’ailleurs bien plus rentable économiquement.
En agriculture, une seconde révolution verte, plus agro-écologique, se développe pour remplacer les intrants chimiques et les énergies fossiles en mobilisant la biodiversité, en adaptant les pratiques agricoles aux paysages plutôt que l’inverse, en restructurant des réseaux de haies et des zones inondables pour contrôler les évènement extrêmes. En développant dans les villes des infrastructures vertes régulatrices, la biodiversité est de plus en plus mobilisée pour diminuer l’impact des températures plus élevées et les conséquences de pluies de plus en plus importantes.
Dans les forêts, la logique de production intensive de bois à croissance rapide avec des espèces exotiques a démontré son extrême fragilité.
La biodiversité peut être aussi une formidable source de savoir et d’inspirations pour le futur, à condition de mieux la connaitre, mieux la comprendre, mieux en prendre conscience en s’immergeant notamment dans la nature sauvage. Mais pour cela il faut lui laisser de la place et il faut donner aux hommes l’opportunité de rencontrer les différentes facettes de la biodiversité.
Action/Réflexion
Toutes les questions que posent les agressions actuelles à la biodiversité sont complexes car pluridisciplinaires, sociales, culturelles, … Or nous assistons chaque jour à des décisions prises dans l’urgence, à des rituels incantatoires qui auront des effets sur ce qu’il adviendra de notre environnement. Chaque jour, nous travaillons dans le parc à « inventer un nouveau modèle de gestion de l’environnement » réinstallant des prés fleuris, multipliant les zones humides, réhabilitant le pacage (pâturage en forêt) par des moutons.
Toutes ces actions, nous les voulons inscrites dans une réflexion plurielle considérant la nécessaire protection de l’environnement, l’activité économique et touristique, la gestion des ressources, … Pour cela, nous avons recours aux plus grands spécialistes actuels dans les matières liées à l’environnement. Nous les avons invités à venir nous expliquer leurs observations, et avec vous, à retrouver le plaisir d’une réflexion complexe, d’un échange fécond, porteur de changement, de développement durable. La réflexion précède l’action et chaque choix doit s’inscrire dans le cadre global d’un schéma directeur …. à cent ans !
Rejoignez-nous pour 6 conférences d’exception qui vont vous faire découvrir notre patrimoine vert.
Bruno Belvaux, directeur
Réservation obligatoire pour chaque conférence.
Port du masque obligatoire
Tarif : étudiant : 12 € / Normal : 15 €.
Lieu : Chateau du Domaine Provincial de Chevetogne (1 rue de Pirchamps, 5590 Chevetogne)
Biographie de la conférencière : Directrice de recherche au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) depuis 1985, Andrée Corvol a fondé le Groupe d’Histoire des Forêts Françaises (GHFF). Dans les années 1990, vice-présidente de l’Union Internationale des Instituts de Recherche Forestière (IUFRO) et de l’Association Internationale Des Entretiens Écologiques (AIDEC), elle fait partie du Conseil scientifique de l’Office National des Forêts (ONF). Dix ans plus tard, elle est élue à l’Académie d’Agriculture, couronnement d’une carrière consacrée à l’Arbre et à la Forêt, en rapport avec l’économie, l’environnement, les civilisations et les mentalités. En témoignent ses nombreux articles et ouvrages.
Résumé : La forêt est aimée, certes, mais son évolution, incomprise. Souvent, les associations de défense des paysages voudraient les figer. Or, les arbres sont comme les hommes : ils vivent et ils meurent. Comment vont évoluer nos forêts ? Comment les adapter à un avenir incertain ? Doit-on laisser faire la nature ? Doit-on au contraire l’assister, voire la piloter ?
Biographie du conférencier : Marc Dufrêne est biologiste et professeur à l'ULiège à Gembloux AgroBio-Tech où il enseigne et travaille sur la conservation de la biodiversité, la mise en valeur des rôles qu'elle assure pour l'humanité et le développement de méthodes alternatives de gestion des paysages ruraux (avec l'agroécologie notamment). Il a longtemps travaillé au Service Public de Wallonie pour développer le Portail Biodiversité en Wallonie, la mise en oeuvre de Natura 2000 et d'ambitieux projets de restauration d'espaces naturels. A l'ULiege, il développe des projets de recherche sur l'insertion des concepts de réseaux écologiques et d'infrastructures vertes et l'évaluation intégrée des services réalisés par la biodiversité avec un focus particulier sur le développement de l'écotourisme orienté "nature sauvage" en Wallonie.
Résumé : L'état de la biodiversité dans le monde est très inquiétant. Avec plus d'un million d'espèces et 25% des vertébrés, invertébrés et plantes qui ont été étudiés considérés comme menacées d'extinction, l'humanité est face un défi majeur sans doute plus prioritaire que les défis climatiques. Et pourtant, la biodiversité représente une partie significative des solutions tant pour les enjeux climatiques, que les enjeux alimentaires, sanitaires, environnementaux, sociaux et économiques de ce siècle. Au lieu de vouloir développer une économie décarbonée, c'est peut-être l'inverse qu'il faut faire : une économie où la biodiversité est maximisée dans tous les processus de production et de régulation, où le carbone mobilisé n'est plus celui des énergies fossiles mais bien celui qui représente cette fois la vie actuelle, pas celle d'il y a quelques centaines de millions d'années.
Biographie du conférencier : Gilles A. Tiberghien, Maître de conférences à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne où il enseigne l’esthétique. Parmi ses dernières publications : "De la nécessité des cabanes", Bayard, 2019 et "Le paysage est une traversée", éditions Parenthèses, 2020.
Résumé : L’étymologie du mot cabane veut dire « petite maison » c’est pourquoi on a pensé que les cabanes étaient à l’origine de l’architecture. Mais on ne fait pas des cabanes comme on construit des maisons en suivant des plans. Pour une cabane on se débrouille sur place avec ce que l’on a, on bricole avec des planches, des draps, de la ficelle. On trouve des chaises, des branches, un arbre tout entier et on invente un monde.
Les cabanes on s’y abrite et on y voyage. Elles nous protègent et nous exposent à la fois. Ces constructions sont souvent liées à la nature mais on en trouve aussi en ville dans des lieux un peu retirés, sous des arcades ou des ponts où les SDF peuvent espérer dormir en paix. Mais pour chacun ces cabanes sont des espaces précieux qui nous permettent de mieux vivre et cela à tous les âges. Nous avons tous besoin de construire des cabanes les enfants comme les adultes.
Biographie de la conférencière : Philosophe, Catherine Chomarat-Ruiz est professeure à l’université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, après avoir longtemps travaillé sur les jardins et les paysages. À ce titre, elle a notamment publié un Précis de paysagétique (Presses universitaires de Valenciennes, 2014) et un essai consacré au Digital Land Art (éditions Eterotopia, 2018).
Résumé : Jardins anglais ou à la française… Entre lignes courbes et lignes droites, entre nature laissée à elle-même ou mise au compas, l’esthétique des jardins semble une affaire bien connue. Pourtant, elle est ainsi réduite à une préoccupation frivole et passéiste, une histoire de styles, de fluctuations du goût ou de modes, de tournant du XVIIe au XVIIIe siècle. « Mais que pourrait-elle recouvrir d’autre ? », dira-t-on. Réponse : une préoccupation majeure pour les jardins de notre temps.
Biographie du conférencier : Jardinier et Architecte du paysage Benoît Fondu est également diplômé en restauration des paysages, parcs et jardins historiques. Il travaille pendant 2 ans l’Arboretum de Kalmthout où il acquiert sa plus riche expérience et où il continue à se perfectionner en botanique. Son analyse poussée du patrimoine arboré et des structures existantes d’un site lui permettent de proposer et de réaliser des projets paysagers respectueux de la mémoire des lieux. Ses interventions se situent dans la lignée de la tradition du jardinage et font appel à la connaissance tacite de sa pratique. Les projets de son équipe les mènent dans divers pays Européens, le bassin méditerranéen et l’Afrique équatoriale. Depuis 1997 il accompagne l’enthousiaste équipe du Domaine de Chevetogne dans l’élaboration d’un projet paysager unique en son genre.
Résumé : Dans Le Triomphe de la sensibilité, Goethe décrit un prince qui adore la nature. Les hôtes, chez qui il arrive, lui ont préparé un déjeuner de chasse dans la forêt. Mais le prince n’aime pas la nature brute. Il la préfère artificielle (artialisée) et, d’ailleurs, l’emmène toujours dans des caisses lorsqu’il voyage : les boites du prince portent la mention de leur contenu, cascades, folies, chants d’oiseaux, arbre taillé, …
Biographie du conférencier : Dimitri Belayew a été titulaire durant 10 ans du cours d'histoire du paysage qu'il a créé pour le master en architecture du paysage (Gembloux). Avec l'UNamur, il a mis sur pied le certificat d'Université en analyse Paysagère, qui a évolué pour devenir ensuite les "Ateliers du paysage", dont Mr Belayew est le principal formateur. Aujourd'hui retraité de l'enseignement supérieur et universitaire, il anime encore le bureau qu'il a fondé en 2012, « Paysages Expertises et Formations », au nom duquel il amène son expertise d'analyse paysagère aux territoires ruraux et urbains qui le sollicitent. Il a conçu et réalisé quatre observatoires du paysage (communes de Anhée et Floreffe, observatoire des paysages ruraux de l’UNamur, Domaine d’Haugimont à Gesves) et des paysages urbains (Confluent des savoirs à Namur).
Résumé : Pourquoi ce territoire est-il resté aussi longtemps inculte alors que les paysans ont toujours cherché la moindre parcelle à labourer ? Pourquoi cette fraction boisée du finage de Chevetogne a-t-elle pu être soustraite, un jour, à l’espace de vie des paysans alors qu’elle constituait un maillon essentiel de leur subsistance ? Pourquoi des familles aristocratiques puis bourgeoises ont-elles pu acquérir et aménager ce domaine en parc paysager alors qu’à l’époque on tentait d’accroître la productivité économique de tout le territoire ? Pourquoi les pouvoirs publics en sont-ils devenus propriétaires et l’ont-ils ouvert au grand public alors que jusque-là seule une élite avait pu jouir de ses bienfaits ?
Trois kilomètres de cheminement pédestre, huit focus éclairant chacun une des logiques qui ont façonné le territoire au cours du temps et un court exposé de synthèse tenteront d’apporter un éclairage à ces interrogations que nous pose aujourd’hui le Domaine de Chevetogne.